- ALIRE (revue électronique)
- ALIRE (revue électronique)ALIRE, revue électroniqueLa revue Alire se présente comme la première revue animée d’écrits de source électronique. Elle est l’émanation d’un groupe de poètes réunis sous le sigle L.A.I.R.E (Lecture Art Innovation Recherche Écriture) qui présenta son premier numéro en janvier 1989 à la revue parlée du Centre Georges-Pompidou. Chaque livraison se présente sous forme d’un coffret contenant plusieurs disquettes informatiques accompagnées d’un livret. Exceptionnellement, le numéro 6 proposait également une cassette audio. Les disquettes dont les formats successifs ont suivi l’évolution des matériels informatiques, contiennent des programmes de poésie que le lecteur peut mettre en œuvre sur son ordinateur. Le livret présente des réflexions et des discussions sur cette poésie nouvelle et, au moins jusqu’en 1994, des éditions sur papier de poèmes produits grâce à l’ordinateur. Depuis cette date, en effet, la revue a fait le choix d’une poésie à lire seulement sur écran. Pour pallier le phénomène d’obsolescence rapide du support informatique, des mises à jour sont proposées qui permettent de continuer à lire les programmes sur les nouvelles plates-formes informatiques.C’est à Stuttgart, en 1959, que parurent, dans la revue Augenblick , les premiers textes de poésie générée par ordinateur. Le programme mis au point par Theo Lutz utilisait les cent premiers mots du Château de Kafka. En 1961 et 1963, Nanni Balestrini s’essayait à des recompositions aléatoires de textes sur une machine I.B.M. (Text Mark I et II ). En 1964, Jean Baudot publiait La Machine à écrire , aux éditions du jour à Montréal, recueil de textes produits par un ordinateur. Les noms d’Emmet Williams, Brian Gysin, John Morris, R. W. Bailey, Jacques Donguy ainsi que ceux des membres de l’Alamo jalonnent ensuite cette préhistoire de la poésie informatique qui trouva son point d’aboutissement en France dans l’exposition Les Immatériaux, présentée au Centre Georges-Pompidou en 1984-1985, ainsi qu’au colloque de Cerisy organisé la même année sur le thème de «la génération automatique de textes littéraires».Le groupe L.A.I.R.E fut créé en octobre 1988 autour de Claude Maillard, Tibor Papp, Frédéric de Velay, Jean-Marie Dutey et Philippe Bootz. Chacun d’entre eux avait déjà travaillé avec un ordinateur. On peut sans doute situer l’origine du groupe dans l’expérience d’Art Access , première revue télématique d’art sur Minitel. La revue ne connut que deux numéros, en 1985 et en 1986, mais elle accueillit des artistes aussi différents que Ben, Fred Forest ou Roy Ascott et fut l’occasion de la rencontre entre quelques-uns des membres fondateurs de L.A.I.R.E.Les œuvres publiées par la revue Alire appartiennent à des genres variés: poésie combinatoire, poèmes visuels créés sur ordinateur puis édités sur papier, textes générés à partir d’autres textes, poèmes visuels dynamiques, poèmes à manipuler par le lecteur, essais, poésie sonore.Mais ce qui singularise la revue est sans doute la manière dont elle utilise l’ordinateur en poésie. Il ne s’agit pas, en effet, de produire des textes dont les formes de surface masqueraient l’origine informatique, comme cherchent à le faire les tenants de la génération automatique. Ce qui compte pour la plupart des membres du groupe est moins le poème comme objet que sa création comme processus. C’est pourquoi la machine ici n’est pas seulement un outil d’aide à l’écriture, elle se veut aussi un outil de lecture. Les textes ne s’impriment pas sur papier, ils s’affichent à l’écran, exploitant ainsi les propriétés de ce nouveau support, notamment la dimension temporelle de l’affichage et l’interactivité. Le texte donné à lire est un texte dynamique, qui apparaît puis se métamorphose ou s’évanouit, qui joue des formes et des rythmes visuels, qui réagit parfois aux sollicitations du lecteur grâce à l’interactivité que permet la souris. Si la dimension visuelle de cette poésie a pu donner lieu parfois à des installations publiques qui l’apparentent aux autres arts électroniques, les auteurs préfèrent cependant se donner à lire dans l’intimité du face à face entre le lecteur et l’écran avec lequel il interagit.Héritiers des mouvements postdadaïstes (poésie sonore, visuelle ou spatialiste), les poètes du groupe L.A.I.R.E se veulent ainsi les pionniers d’une poésie multimédia qui rencontre désormais des échos à l’étranger avec les œuvres de Jim Rosenberg, Robert Kendall ou Eduardo Kac.
Encyclopédie Universelle. 2012.